Le lundi au soleil, C’est une chose qu’on n’aura jamais, Chaque fois c’est pareil…
Dans le mille, Claude ! Comme certaines dates, Le jour, ce jour, pèse sur tout mon être. Le lundi, lui-même. Et inlassablement, c’est la même chose d’une semaine à l’autre, depuis plus d’un an.

 

Pourtant ce n’est pas faute d’essayer, de tâtonner, d’expérimenter, de mettre en place des stratégies de diversion ou d’évitement.
Fermer les yeux, les ouvrir, regarder en face, sur les côtés, éviter de se retourner, faire comme si c’était un mardi, ne pas y penser, ne pas penser simplement, s’occuper à outrance, ne rien faire, avancer, rester immobile, affronter, fuir, s’enfuir. Peu de choses fonctionnent, j’appréhende chaque lundi, qui me le rend bien !

Tu vas me dire, je ne suis la seule à redouter l’arrivée de ce jour, à le détester sans raison apparente. Qui n’a jamais entendu dans son entourage « J’aime pas le lundi » ? La fin du week-end, quitter son cocon, reprendre le chemin des obligations, des contraintes, simplement débuter une nouvelle semaine. Toi aussi, tu ne l’appréciais pas beaucoup, retourner à l’école après une pause ne te réjouissait guère, cela te saisissait dès le dimanche soir, tu en perdais presque ton joli sourire, tu avais du mal à t’endormir, redoutant le lendemain. Comme beaucoup de monde, tu avais tes raisons de ne pas aimer cette journée. Aujourd’hui, la mienne est si profondément ancrée en moi, dans chacune de mes cellules, dans chaque recoin de mon corps et de mon esprit, enregistrée, gravée au fer rouge, qu’il m’est difficile de l’ignorer et de faire semblant. Il y a des lundis où je me suis même dit, bêtement, que j’aimerais perdre la mémoire. Libérée, délivrée. Non, je ne le souhaite pas vraiment. Je ne veux pas me soustraire à mes souvenirs de toi, même les douloureux. Ils me lient à toi, ils sont toi, le toi, l’unique qu’il me reste aujourd’hui.

Des lundis, il y en a eu plein dans ma vie, plus de 2300. Mais un seul me hante, tourne en boucle. Celui du 5 octobre 2015. Cette journée se rappelle sans cesse à moi, me ramène à la dernière de ta vie, de notre vie ensemble. A sa durée, si longue et si courte à la fois. A son caractère irréel et si réel pourtant. A ta souffrance que les docteurs ont étouffée petit à petit en te plongeant dans un sommeil irréversible. A ta sœur qui a su être proche de toi tout en maintenant la distance nécessaire à ta pudeur et à la sienne. Aux personnes qui étaient là pour toi, autour de toi, comme pour faire barrage à la réalité et à la bête. A tous ces hommages discrets, sourds et poignants, rendus furtivement, abondamment, publiquement, en silence. A nos sourires, à nos larmes, à nos cris. A toi qui a joué à l’équilibriste sur le fil de ta vie et qui a fini par tirer ta révérence. Et surtout à cet affreux Crabus Ewingus que tu as réussi à quitter ce jour là avec une telle force. Au revoir tout le monde !

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