31 décembre 2015. Montpellier. S’échapper, se soustraire à notre réalité, fuir, ne pas avoir à décider, se laisser porter, s’entourer. Dans cette petite chapelle, allumer cette bougie, faire de la lumière, t’honorer, t’éclairer, simplement se réchauffer, me réfugier dans les bras de Caro.
Le soir, se confronter à ton absence intolérable, ne pas céder à la panique, tenter de faire comme-ci. Te regarder trôner sur notre table, ressuscité en statuette pathétique d’angelot pourtant si réconfortante. Attendre minuit, pleurer, s’embrasser, s’enlacer, se rassurer, sentir le lien invisible si puissant que tu crées entre nous tous ici et là-bas, fermer les yeux, se réveiller. Sans toi.

L’anniversaire de ta sœur. Toutes ces filles si enjouées. Ne pas la décevoir. Etre à la hauteur. T’imaginer parmi nous, se défilant et esquivant ces furies joyeuses. Les fameuses et célèbres pizzas de Papa, celle que l’on t’aurait emmenée discrètement dans ton antre. Se laisser piéger par la musique si forte. Se sentir vidée, si fatiguée et si seule. Observer, s’interroger, se demander comment Mathilde réussit à s’amuser, comprendre sa réalité, son besoin vital de vivre. Pour elle, pour toi. Aussi sans toi.

Et tous les autres anniversaires. Les nôtres, les leurs, le tien. Ces jours qui se fêtent, qui rendent mon manque de toi encore plus criant. Ne pas savoir où se mettre. Tâtonner, évaluer ce dont j’ai envie. Toi. Ce dont je me sens capable. Rien. Se cacher, attendre que cela passe. Non, ne pas être seule. Se réfugier dans l’amour que l’on m’offre si généreusement. Te chercher partout, paniquée. Dans un regard, un geste, une parole, un souvenir. Te sentir présent, en et dans nous. Se laisser aller, s’évader, sangloter, suffoquer, chanter, sourire, rire, danser. Sans toi.

Nos vacances dans ces lieux où tu es si présent. Et terriblement absent. En perdre la tête, la joie, l’envie, la foi. Etre en colère. Après tout et rien. Ne plus supporter. Ces gens qui dégueulent leur bonheur sur une piste de ski ou sur leur serviette de plage. La neige immaculée, les rayons de soleil, la mer à perte de vue. Se sentir si différente. Trébucher, vaciller, basculer. Et s’accrocher à ce qu’il reste de plus précieux. Vivre. Sans toi.

Aussi toutes ces premières fois. Sans toi. En percevoir leur signifiance. Manger ton plat préféré. Regarder un film que tu aurais adoré. Fouler le sol de ton collège. Revoir tous tes amis, les nôtres. Aller ici ou là. Refaire ces choses que l’on a toujours faites avec toi. Sans toi.

31 décembre 2016. Boucler cette première boucle. Sans toi. Reprendre une nouvelle fois la réalité en pleine face. Se déguiser. La déguiser pour la rendre plus douce. Etre ensemble pour se sentir plus forts. Belote et rebelote. Attendre minuit, pleurer, s’embrasser, s’enlacer, se rassurer, te sentir vivant, fermer les yeux, se réveiller. Sans toi. Et comprendre un peu plus l’incompréhensible. Que ma vie sans toi va durer, dans la tristesse, la colère, la joie, l’amour. Pour elle, pour lui, pour eux. Pour toi.

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